Original est un mot bien faible pour décrire Robert Wyatt, l’homme et son oeuvre. Cette rétrospective en deux CD commence juste avant son départ de Soft Machine, dont l’unique morceau figurant ici (probablement pour des raisons de droits) est une version inédite de « Moon In June » enregistrée chez John Peel, totalement délirante et géniale, treize minutes d’improvisation musicale et vocale (des paroles à hurler de rire) qui justifieraient presque l’achat du disque à elles seules. On a droit tout au long de ces deux CD à une alternance de classiques et de petites perles inédites, une sorte de malle au trésor, où c’est franchement le foutoir, mais dans laquelle on a plaisir à fouiller. Les classiques, c’est presque tout Rock Bottom, dans le désordre, ce qui me défrise un peu, mais c’est probablement intentionnel. Avec bien sûr « Sea Song », la plus belle et la plus étrange chanson du monde, et surtout la plus triste, toutes catégories confondues. Un sommet. De larges extraits de Ruth Is Stranger…, trois morceaux de Matching Mole (formidable « O Caroline »). Et puis des choses plus rares, comme les trois premiers singles, avec la reprise du « I’m A Believer » des… Monkees, des morceaux avec Carla Bley et Mike Mantler, un extrait de l’album solo de Nick Mason (batteur du Pink Floyd et producteur de Rock Bottom), « Rangers In The Night » (from Miniatures). Le tout se clôt par « L’Internationale » ! Communiste un jour…. Le tout est bien sûr déroutant, totalement anticonformiste, survolé de bout en bout par cette voix magique, qui donne la chair de poule. On peut avoir des regrets sur l’absence de certains titres, l’aspect hétéroclite de l’affaire, mais pour un musicien inclassable, le concept de compilation est forcément inadéquat. Il y a de tout dans cet album, mais du début à la fin, on y entend de la musique comme on n’en fait plus. Pour l’instant.